Un train une ville :
Dijon, la ville envisagée, oui, le train, non…
Nous avions visité Bourges,
Besançon, Dole en empruntant ce moyen de transport écologique et convivial mais
aléatoire. Impossible dans ce pays de résoudre les problèmes de la SNCF
autrement que par des rapports de force dont la grève. Cette année, faute de
train, les 27 participants ont recours à un moyen de transport semi-collectif,
le covoiturage. De Perrecy, du Creusot, de Broye, 7 véhicules convergent vers
la Capitale des ducs de Bourgogne.
A 9 h 15 tout le monde se
retrouve sur le parking visiteurs de la Chartreuse de Champmol, actuellement
hôpital psychiatrique addictologie et santé mentale, et l'expression « aller à
la Chartreuse » signifie aujourd'hui à Dijon être hospitalisé en psychiatrie .
Pourquoi Champmol ? Parce que le terrain était marécageux.
Vue en perspective de la
chartreuse de Champmol, 1686
A 9 h 30 apparaît notre guide,
un puits de science qui nous conduit au puits de Moïse tout proche, l’un des
deux grands ensembles conservés à la Chartreuse avec le portail de la chapelle
qui contenait autrefois les tombeaux monumentaux des ducs Philippe le Hardi et
Jean sans Peur.
Le puits de Moïse est le
vestige d'un calvaire situé au milieu d'un puits autrefois au centre du grand
cloître de la Chartreuse de Champmol.
Commandé par Philippe II de
Bourgogne dit Le Hardi, il est l'œuvre du sculpteur hollandais Claus Sluter et
de son neveu Claus de Werve, avec la participation du peintre Jean Malouel pour
la polychromie. Il a été sculpté et peint entre 1396 et 1405. Les six prophètes
Moïse, Isaïe, Daniel, Zacharie, Jérémie et David sont représentés sous des
traits naturalistes, habillés de manière contemporaine, là encore on pourrait
croire à de véritables portraits, accentués par des détails comme les lunettes
(disparues) du prophète Jérémie. Détruit dans sa partie haute au cours du
XVIIIe siècle, il n'en subsiste plus que la partie basse, constituée d'une pile
hexagonale surmontée de six statues de prophètes de l'Ancien Testament. Seuls
quelques fragments des statues situées autour de la croix sont actuellement
conservés au musée archéologique de Dijon. Ce calvaire, qui montre le lien
entre l'Ancien et le Nouveau Testament, est aussi une œuvre marquée par de
nombreux symboles liés à l’ordre des Chartreux. Enfin, de nombreux indices font
du monument une œuvre de propagande en faveur du duc de Bourgogne.
Le duc décédera en 1404, un an
avant la fin de la réalisation du puits
de Moïse.
Il est considéré comme un
chef-d'œuvre de la sculpture du gothique international et un précurseur de
l'art de la Renaissance, un siècle avant la création du Moïse de Michel Ange.
Nous sommes captivés par cette
profusion d’explications dont je ne relate qu’une infime partie. Vous trouverez
sur internet en tapant puits de Moïse et
Chartreuse de Champmol une grande partie de ce que Frédéric, notre guide, nous
a énoncé.
Les restes de la
Chartreuse.
Nous traversons les jardins de l'hôpital plantés d'arbres vénérables et passons à proximité de l'ancienne tourelle de l'oratoire ducal.
Nous parvenons au porche d'une chapelle qui intègre les vestiges du portail. Ce porche couvert met totalement hors d'eau et hors d'air le portail et contribue à sa conservation.
Les historiens attribuent la conception du portail à l'architecte Drouet de Dammatrtin et au sculpteur Jean de Marville. L'attribution de la Vierge à l'enfant se fait tantôt à Jean de Marville , tantôt à Claude Sluter.Cependant le portail a été élargi par rapport au plan initial, peut-être lorsque Claus Sluter en a changé la conception afin d'ajouter les figures des ducs et des saints intercesseurs qui sont de sa main.
Les donateurs agenouillés sont présentés à la Vierge par un saint intercesseur, à gauche, le duc Philippe le Hardi agenouillé devant Saint Jean Baptiste, à droite la duchesse Marguerite, devant Sainte Catherine au centre la Vierge tenant l'enfant Jésus. La Vierge surtout retient l'attention par son mouvement et par les plis complexes du drapé de son vêtement.
Statue de Philippe le Hardi.
Vous imaginez facilement que notre estomac commence à crier famine. D’ailleurs Roger, responsable des horaires nous demande de presser un peu le pas. Nous traversons les magnifiques jardins de l’Arquebuse sous une averse qui gâche notre plaisir. Après une petite marche apéritive, nous arrivons à midi et quart, comme prévu, à la porte de la brasserie des Loges au 8 de la place du Théâtre.
Le menu, jambon persillé,
poulet sauce moutarde et tartelette au cassis est copieux et bien cuisiné. Il
nous faut avaler rapidement le café car notre guide de l’après-midi prend le
relais à 14 heures.
Nous allons arpenter les rues
de la ville pour découvrir un autre aspect de son histoire, l’avènement aux 17èmes
et 18èmes siècles de nombreux hôtels particuliers construits par une
nouvelle noblesse de robe enrichie grâce à des fonctions très lucratives. Leurs
noms à rallonge suffisent à nous renseigner sur leur fatuité de parvenus.
Beaucoup sont assez délabrés
et c’est dommage car ils ont une belle valeur architecturale. D’autres sont devenus
propriété de la ville ou ont été aménagés en logements. Comme à chacune de nos
expéditions, nous commençons à ressentir la fatigue et nous sommes moins
attentifs. Cependant, nous avons un regain d’intérêt pour la visite du musée de
la vie bourguignonne avec la reconstitution d’une rue avec ses anciens
commerces. Nous retrouvons quelques souvenirs de notre enfance et nous pouvons mesurer à quel point notre vie
aura changé au cours d’à peine un siècle.
La journée s’achève, nous
regagnons les voitures. Magasins et cafés ont beau nous tendre les bras. Peu se
laisseront tenter, les activités de la journée ayant suffisamment usé nos
énergies.
Histoire de la Charteuse (source
Wikipédia)
La construction de la chartreuse est décidée par Philippe le Hardi et le chantier inauguré
au mois de septembre 1378.
Philippe le Hardi acquiert un domaine au lieu-dit La Motte de Champmol. La première pierre de l'église est posée le 20 août 1383. Le duc souhaite
créer une nécropole rivale de celle des Capétiens,
à Saint-Denis . Le projet prévoit la
construction d'une église et de bâtiments conventuels, un
petit cloître, un grand cloître bordé de cellules spacieuses qui comportent un étage
et un grenier et orné d'une fontaine centrale en forme de calvaire, la salle capitulaire et la sacristie., Les
travaux ne commencent vraiment en fait qu'en 1383 et les moines s'installent
dans le cloître en octobre de la même année. En 1399, les bâtiments du pressoir sont
terminés et les moines commencent à exploiter leur vigne.
Un chantier prestigieux
Le chantier emploie plus de deux-cent cinquante
ouvriers venus de divers horizons géographiques et de tous les corps de métier
du bâtiment : imagiers (sculpteurs), peintres, tuiliers, verriers,
menuisiers, fondeurs.
Le duc emploie des tailleurs de pierre
d'origine hollandaise, dont Claus Sluter. Le portail est
l'œuvre de Claus Sluter, promu maître de l'atelier en 1389, qui s'occupait de
la décoration de la Chartreuse. C'est également lui qui réalise le puits
de Moïse, calvaire doublé d'une fontaine, qui se trouvait dans le grand
cloître.
Un projet politique
En fondant la chartreuse de Champmol, Philippe
le Hardi manifeste une double volonté : celle de démontrer sa piété et
celle de se poser en mécène. Enfin, en fondant la Chartreuse de Champmol, Philippe
II indique que la capitale de ses États est Dijon, et non Lille. Par ailleurs,
il rompt avec ses prédécesseurs puisque les ducs capétiens se faisaient inhumer
à l'abbaye de Cîteaux, et affirme de fait la
spécificité de la nouvelle dynastie bourguignonne.
Lorsque le duc Philippe meurt le 27 avril 1404, son tombeau
n'est pas encore achevé. Les héritiers de Philippe le
Hardi
Le nouveau duc, Jean sans peur, en confie l'achèvement à Claus
Sluter puis à son neveu Claus
de Werve. Tout au long du XVe siècle,
les ducs de Bourgogne continuent à enrichir la chartreuse.
De la chute des États
bourguignons à la révolution française
Du XVIe au
XVIIIe siècle, elle demeure un
monument très admiré, même si les travaux de modernisation au XVIIIe siècle la privent de certaines
œuvres médiévales, jugées désuètes et remplacées par des
objets contemporains.
La Révolution française
et le XIXe siècle
Par le décret du
2 novembre 1789, l’Assemblée constituante décide que les biens
ecclésiastiques sont mis à la disposition de la Nation ; par le décret du
13 février 1790, l’Assemblée supprime les ordres et congrégations régulières.
La Chartreuse devient bien national et les Chartreux en
sont chassés en avril 1791.
Elle est mise en vente et, en 1791, Emmanuel Crétet (futur ministre de l'intérieur de Napoléon Bonaparte) utilise sa fortune
personnelle pour l'acquérir.
Sous le règne de Louis-Philippe, un hospice d'aliénés y est aménagé
pour accueillir jusqu'à 250 malades. L'ouverture définitive eut lieu le 1er
janvier 1843.
Aujourd'hui
Aujourd'hui, « la Chartreuse »
désigne un centre hospitalier spécialisé en psychiatrie, addictologie et santé
mentale, et l'expression « aller à la Chartreuse » signifie
aujourd'hui à Dijon être hospitalisé en psychiatrie.
Malgré ces vicissitudes, il demeure à la Chartreuse de fort intéressants
morceaux de sculpture médiévale, témoignages majeurs de l'art burgondo-flamand.
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