Visite guidée d'Autun


Doit-on en vouloir à nos aïeux d’avoir utilisé les vestiges des prestigieux monuments gallo-romains pour leurs propres constructions ? N’était-ce pas en quelque sorte une forme de recyclage et une appropriation bien avant notre siècle des circuits courts  fréquemment évoqués en France lors du Grenelle de l’environnement ?
Doit-on en vouloir à nos maîtres de nous avoir, en nos vertes années, enseigné leurs certitudes ? A l’époque, aucun cancre n’aurait osé interrompre l’un d’eux en clamant « Tais-toi et creuse ». Nous le savons maintenant ; la réponse à nos interrogations est souvent cachée dans les strates inférieures du sous-sol autunois.
Tout au long de la journée, Rob nous aura transmis les certitudes qui font autorité en 2013.
Jacques en a recueilli une bonne part et son mérite est grand, les conditions atmosphériques, le tempo impétueux de notre guide et la relecture de notes prises à la hâte représentant autant d’obstacles à la réécriture des moments forts de cette journée.
 Le temple de Janus n’aurait pas été consacré à Janus, le nom du site, le Gènetois ayant au 16ème  siècle induit en erreur un lettré de l’époque, l’étymologie signifiant lieu planté en genêts.  Il s’agit d’un Fanum, temple gaulois dédié peut-être à Epona (déesse des chevaux) à moins que ce ne soit à Sucellus (dieu multicarte honoré par les bûcherons, les brasseurs, les tonneliers, les carriers, les constructeurs de radeaux, dieu qui tue et qui ressuscite avec son maillet qu’il tient dans la main gauche, protecteur des récoltes et des troupeaux,  "dispensateur d'aliments". Il est le détenteur de la prospérité, symbolisée par cet autre attribut qu’est le chaudron, dans sa main droite. C’est un dieu de la nature nourricière, des forêts et des plantations « d’après wikipédia »).
Le monument nous est parvenu en un bon état de conservation grâce à la qualité du mortier romain qui se révèle aussi dur que la pierre.
 
Des photos aériennes effectuées lors de grandes périodes de sécheresse ont révélé les traces d’un théâtre, de temples, de nombreux bâtiments d’une ville gauloise antérieure et de fossés défensifs du Moyen-âge.
Augustodunum, situé au pied de collines, bordé d’une rivière et protégé par des marécages est un cadeau fait par Auguste aux Eduens et ne possédait pas d’implantation antérieure.
La porte d’Arroux, au nord de la ville devait révéler, vue de l’extérieur, la richesse de la ville, ce qui explique l’utilisation de blocs de pierre venant de la côte chalonnaise. Le côté intérieur est nettement moins soigné.
Des rainures verticales rappellent la présence d’une herse destinée à fermer l’accès de la ville, en particulier la nuit. D’autres rainures, obliques, sont dues à la construction au Moyen-âge d’une chapelle.

 

Augustodunum avait son port. Les champs extra-muros ont révélé des milliers d’urnes et de stèles funéraires.
Pistillus est un potier gallo-romain qui vécut et exerça à Augustodunum (Autun), à la fin du IIe siècle et au début du IIIe siècle apr. J.-C. Il est connu des archéologues par l'abondante production de figurines de terre cuite représentant des déesses, des animaux ou des scènes érotiques. Il fait partie de ces potiers dont le nom, gravé sur les moules, a traversé les siècles jusqu'à l'époque contemporaine.
De la porte Saint André, à l’est de la ville, reste une tour transformée actuellement en temple. La construction est soignée, en « petit appareil » constitué de petites pierres du plateau d’Antully taillées (on peut imaginer les heures passées !). La partie gauche a été restaurée par Viollet le Duc.


Le théâtre était le plus grand du monde romain, 148 m de diamètre. C’était avant tout une œuvre de prestige avec ses 20000 places (à titre de comparaison, Orange n’en a que 5000)
Ce théâtre avait trois étages de gradins : un étage Inférieur : taillé dans le terrain desservi par des escaliers (vomitorium). Un étage médian construit sur des voûtes de soutènement comblées (et non des caves ou cages à fauves). On trouve les traces du promenoir, départ d’escaliers montants et descendants agrémenté également de boutiques. La finition était soignée avec des joints tirés. L’étage supérieur a entièrement disparu. Il s’élevait jusqu’au niveau de la cime des grands arbres actuels.

 
Le mur de scène s’élevait à la même hauteur. Des câbles reliés aux gradins supérieurs permettaient à des marins de tendre des voiles en cas de soleil ou de pluie.
L’acoustique était remarquable et, aujourd’hui encore on peut depuis un point précis (à 1 mètre près) situé au centre, au pied de la scène, constater que la voix porte dans tout l’édifice par un phénomène de réverbération.
Dans la façade de la maison du garde on remarque quelques éléments trouvés sur place et deux gisants (debout !) du prieuré de Mesvres.
Il existait également un amphithéâtre, voisin du théâtre destiné aux jeux populaires (gladiateurs, fauves, naumachies avec ou sans crocodiles…) entièrement détruit au 16ème pour construire le séminaire, actuelle école militaire.
La ville romaine est entourée de 6 km de remparts avec 4 portes correspondant aux voies de desserte. Nord – sud pour le Cardo maximus et est - ouest pour le Decumanum maximus.
52 tours correspondaient aux rues tracées à angle droit.
La porte sud située au niveau de la rue Joliet a disparu. En face, a été découvert un ancien champ d’urnes.
     
La Pierre de Couhard est un cénotaphe (monument à la mémoire de.) et non un tombeau. C’est un cube plein de 33 m de côté terminé en pyramide. Les curieux espérant y découvrir un trésor lors de fouilles du 17ème au 19ème  siècle en ont été pour leurs frais.

 

Sur la Place de Charmasse, le mur dit « Temple d’Apollon » est en fait un nymphée (fontaine). Le temple était au niveau de l’hôpital.
 
Un court trajet en bus sur la D 120 jusqu’au carrefour des routes de Fragny et Montjeu permet de découvrir la partie visible d’un des deux grands aqueducs de 6,2  km fournissant à l’époque Augustodunum en eau. Pour pallier l’inconvénient d’un dénivelé de 120 m et casser la pression, les techniciens ont prévu 14 puits d’environ trois mètres chacun alternant avec des parties en pente faible. On peut trouver un morceau de regard au musée lapidaire.

 
Rob nous signale une ancienne prise d’eau située à proximité de l’entrée du chemin de Brisecou permettant d’alimenter un moulin d’émoulage. Des jardins en terrasses en contrebas d’un bâtiment (1820) appartenant à la famille De Charmasse ont disparu, gagnés par la forêt. Ils étaient alimentés par une prise d’eau repérable grâce à une marque orange sur un arbre. La cascade qui permet au trop plein de regagner le lit du ruisseau est donc artificielle. Déception pour le groupe et désappointement du guide : elle est à sec, un obstacle quelconque ayant détourné le flot en amont. Le pique-nique est vite expédié et nous traversons sur une passerelle métallique le ruisseau.
 
Celui-ci était exploité au maximum. L’eau était à nouveau en partie déviée pour, à partir du hameau de Couhard, alimenter une série de moulins dont l’un fonctionne encore pour fournir de l’électricité.
Nous suivons le chemin de la Mine peut-être dénommé ainsi à cause de l’exploitation de l’étain sur le coteau proche. Au passage Rob nous signale un calvaire élevé en mémoire du martyre de Saint Léger. C’est là qu’il eut les yeux crevés, prélude à une série de méchancetés raffinées. (voir son histoire en cherchant sur internet).
Le moulin de la Belle Simone en fait fantasmer quelques-uns. Nos pas nous conduiront tour à tour vers le moulin Gamet, le moulin du Breuil, mais nous n’irons pas jusqu’au moulin du Vallon en service jusqu’à la mise en eau de l’étang du même nom.
 
C’est au quartier Saint-Blaise que l’aqueduc de Montjeu était rejoint par celui de Montdru. A partir de là, l’eau était répartie dans des fontaines publiques et chez quelques notables favorisés. Une conduite qui passait sous la cathédrale est encore visible dans la cave du bistrot le Lutrin.
 
Nous continuons par la visite du musée Rolin. Installé dans la maison natale (XVe siècle) du chancelier du duc de Bourgogne, Nicolas Rolin, le musée renferme des collections articulées en quatre départements. Nous en visitons deux :  le département ‘archéologie romaine’ présentant l'aspect et les activités de la cité antique ;
le département ‘histoire de l’art médiéval’ présentant entre autre des pièces telles que la "Tentation d'Eve" de Gilbertus, Gislebert. Aucune nouvelle d’Adam. Il dormirait dans le mur d’une pharmacie du centre ville. Attendons qu’elle tombe en ruines pour vérifier.
 
Nous apprécions les mosaïques. Les schistes bitumineux exploités jusque dans les années 50 dont deux terrils coniques rappellent l’existence permettaient de créer les tesselles noires qui s’exportaient.
Les dieux Lare hantent toujours les foyers des retraités, ce qui explique leurs recherches perpétuelles d’objets courants (lunettes, clefs, stylos…) qui ne sont jamais là où on croit les avoir laissés.


 La cathédrale Saint Lazare, orientée Nord-Sud, est l’aboutissement de divers édifices religieux dont le premier fut la cathédrale St Nazaire. Lieu de pèlerinage, elle put concurrencer Vézelay grâce aux reliques de Saint Lazare, pas le ressuscité mais l’autre, évêque moins prestigieux mais qui permettait d’entretenir la confusion.
Je vous renvoie à Wikipédia qui se montre très prolixe au chapitre « Cathédrale d’Autun ».

 
L’infatigable Rob, toujours passionné et passionnant va de chapiteau en chapiteau pour, point d’orgue de la visite nous conduire au Tympan, œuvre maîtresse de Gislebert. Denis Grivot, chanoine de son état, rachète aux yeux de Rob tous ses prédécesseurs parfois peu recommandables par la redécouverte et la remise en place de la tête du Christ soustraite au Musée Rolin de manière rocambolesque.
 
 
 
 
 

Nous commençons à traîner sérieusement les pieds mais il serait inconvenant de ne pas terminer la journée par un dernier parcours dans les vieilles rues autour de la cathédrale.
Le musée Vergé Tarin est une curieuse maison (7 rue des Sous Chantres) dont les derniers habitants (2 frères célibataires) ont vécu sans y changer quoi que ce soit. L’intérieur est figé fin 18ème. Le musée est actuellement fermé car en mauvais état. Les Sous Chantres étaient de jeunes chanteurs qui étaient logés ici au 17ème.
 
 Plus loin, une statue en bronze de St Michel terrassant le dragon sur une cheminée est un don de fidèles à l’évêque réfugié ici après avoir été chassé de l’évêché par un maire anticlérical de la fin du 19ème.
 
La partie de la ville haute était occupée par les chanoines enrichis, petit état dans la ville. On remarque une impasse le Cul de sac de l’évêché et la maison du Doyen, Place Ste Barbe avec ses fenêtres à meneau et à accolades.
 
Nous descendons la Rue des Bancs occupée par des bouchers car elle était proche de l’abattoir.
En bas de la rue, on devine grâce à des feuillures et les encoches des barres de fermeture l’emplacement des portes de la ville haute sur un seul côté suite à l’élargissement de la rue..
A la fin de la rue se remarque la trace d’un pivot du pont levis qui surplombait un fossé (rue Cocand)
Nous jetons un ultime coup d’œil aux remparts les mieux conservés, à l’origine 2 fois plus hauts mais rabaissés par les propriétaires des hôtels particuliers qui souhaitaient profiter de la vue sur le Morvan.
 
Nous voici à nouveau sur le Champ de Mars, point de départ matinal. Nous ne savons comment exprimer notre reconnaissance à notre guide sinon en prenant rendez-vous pour l’an prochain. Nous réfléchissons à une nouvelle formule destinée à remplacer le thème qui nous aura tenus en haleine pendant dix ans autour des grands sites bourguignons.  
 
Prise de notes, Jacques. Photos, Louise et Daniel. Rédaction du compte-rendu, Daniel.

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