Escapade en terre nivernaise.

Allo, à l’eau Jack.
L’absence de réseau sur les portables a parfois du bon.
Dimanche, 7h45 : quelques irréductibles marcheurs se retrouvent sur la place de la Mairie pour une journée de randonnée à l’étang de Baye et le long du canal du Nivernais plus précisément la tranchée de la Colancelle et l’échelle de Sardy.
Il pleut et les infos météo sont pessimistes. Peut-être que les intempéries se sont calmées dans la Nièvre. Pas moyen d’établir le contact avec Claudine et Jacques.
Allons déjà à Autun.
Nouvelle tentative de contact, nouvel échec.
Nous roulons toujours. De plaines en forêts, de vallons en collines (Jean Ferrat), nous n’en finissons pas de passer de l’espoir à l’abattement, du découragement à l’optimisme, le ciel s’éclaircissant ou s’assombrissant toutes les 5 mn.
Nous sommes à 6 km du but quand la liaison est enfin établie et voici pourquoi le manque de réseau a du bon :
« Si vous m’aviez eu à 7 h 45, je vous aurais dit d’annuler car il pleuvait à seaux sur le canal» nous  confirme Jacques.
Le ciel souffre toujours d’incontinence mais nous sentons bien que ce sont les dernières gouttes.

Au départ : équipé contre la pluie

Nous voici partis. Noël jubile, pas la moindre trace de résineux.
Nous surplombons une profonde tranchée qui permet au canal de suivre une courbe de niveau. Là où le sol argileux était instable, trois tunnels ont été creusés. Je nous imagine, armés de lampes électriques, longeant sur un trottoir étroit et gluant les eaux obscures, évitant les attaques de rapaces nocturnes, frôlés par les chauves-souris, hantés par le souvenir des bagnards qui ont perdu la vie dans les éboulements. Suis-je bien réveillé ?

Jacques est intarissable sur l’histoire du canal, (voir article précédent) ponctuant chaque événement de chiffres et de dates sans oublier quelques anecdotes comme la construction du pont ayant permis à un ingénieur amoureux d’une accorte fermière de lui éviter un détour conséquent et surtout de la rejoindre facilement.
 
L’horizon s’élargit. Nous ne surplombons plus la tranchée mais nous longeons le canal en dénombrant une à une les écluses très rapprochées pour compenser un dénivelé de 40 m. A proximité de la dixième, nous découvrons le bateau de Jacques.
 


 
 
Claudine se joint à nous. Nos estomacs crient famine car le petit déjeuner du matin est bien loin. Les maisons des éclusiers sont occupées maintenant par des artistes ou des artisans d’art hauts en couleur.




 
 (Ce sont les abords de leurs habitations qui nous le suggèrent avant que Jacques ne nous le confirme), occupent notre esprit mais c’est avec soulagement que nous atteignons la seizième écluse et ses tables de pique-nique. Les sièges ont séché, c’est du moins ce que nous croyons car nous repartirons, les fesses bien fraîches.
Un rayon de soleil fait son apparition. « Il va nous chauffer une beurrée » entend-on. En attendant, chacun déballe son en-cas, les moins égoïstes proposant même quelques gâteries. Nous apprécions ces gestes désintéressés.


Le groupe repart, amputé de quelques unités qui attendront notre retour au bateau.  Nous traversons une voie ferrée qui sert au transport de ballast extrait d’une carrière proche. Les pauses se succèdent.
 
Brigitte, intriguée par le caractère géologique du territoire nous livre le résultat de ses recherches faites au retour :
« Je me suis penchée, mais sans tomber, sur les "porphyres" entrecoupés de glaise qui me chiffonnaient hier.
Voici le résultat de mes cogitations; je ne sais pas si cela vous intéressera, mais tant pis.
J'ai découvert que le terme de "porphyre" recouvrait plusieurs choses (comme d'ailleurs "granit" sans "e")
 C'est une roche rare, utilisée dans la construction de statues, tombeaux.. Mais c'est aussi un nom donné par les carriers à toute roche ayant plus ou moins un aspect rougeâtre. 
 Hier, ce terme s'appliquait à 2 roches différentes!!!
L'une, la rhyolite, roche volcanique, provenant donc d'éruptions (fort lointaines dans le temps) peut être entrecoupée de glaise: la lave s'est, je suppose déposée dans un milieu aquatique, puis a été recouverte par un sédiments argileux)
L'autre est une roche de granite rose à gros cristaux que les géologues appellent "porphyroïde" (vous voyez la malignité du truc!!)
D'après la carte géologique, ces 2 roches sont présentes dans le secteur que nous avons traversé. »
Brigitte est également sollicitée pour ses connaissances en botanique, les nôtres faisant fi des infimes particularités qui distinguent parfois deux espèces.
 SDF cherche abri (la coquille était vide)
Neige, non pétales de cerisiers

La beurrée annoncée au cours du repas de midi se manifeste par quelques coups de tonnerre éloignés avant de s’abattre sur la troupe. Heureusement, une épicerie abandonnée à Sardy les Epiry nous offre l’abri de son avancée.



 
Un quart d’heure plus tard, nous repartons. Nous abordons la seule côte du parcours, encouragés par un troupeau qui s’approche, attiré par le poncho rouge vif de Martine puis qui s’enfuit en débandade, effrayé par nos parapluies. La pluie cesse. Nous atteignons la rigole de l’Yonne. L’environnement forestier est enchanteur. Catherine en vient à oublier sa garrigue méridionale, subjuguée par le vert tendre des hêtres et le calme du site.
Et c’est le retour au bateau de Jacques. Claudine, aux petits soins pour nous, propose des boissons chaudes et quelques gâteaux.
 
Nous terminons les quatre derniers kilomètres de notre circuit sur un bateau propulsé par un moteur électrique. Nous empruntons la tranchée et les trois tunnels de la Colancelle.
 
 Nous ne sommes pas seuls. Un groupe associant musiciens, écrivains, cinéastes nous tient compagnie. Bernard Lavilliers est à l’honneur, magnifié par un chanteur au look et à la voix tout à fait dans le ton.  Un dernier tour sur l’étang de Baye marquera le terminus de notre escapade. Un espace pique-nique nous permet de prendre une collation à la santé des organisateurs. Un magnifique arc en ciel aux couleurs très vives nous tient compagnie sur la totalité du parcours du retour, arc de triomphe démesuré pour célébrer la vaillance des onze marcheurs d’AMUR.

Coucher de soleil.

Photos de Michelle et de Claudine

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