28 avril : visite de Dijon.


Un train une ville : Dijon, la ville envisagée, oui, le train, non…
Nous avions visité Bourges, Besançon, Dole en empruntant ce moyen de transport écologique et convivial mais aléatoire. Impossible dans ce pays de résoudre les problèmes de la SNCF autrement que par des rapports de force dont la grève. Cette année, faute de train, les 27 participants ont recours à un moyen de transport semi-collectif, le covoiturage. De Perrecy, du Creusot, de Broye, 7 véhicules convergent vers la Capitale des ducs de Bourgogne.
A 9 h 15 tout le monde se retrouve sur le parking visiteurs de la Chartreuse de Champmol, actuellement hôpital psychiatrique addictologie et santé mentale, et l'expression « aller à la Chartreuse » signifie aujourd'hui à Dijon être hospitalisé en psychiatrie . Pourquoi Champmol ? Parce que le terrain était marécageux.


Vue en perspective de la chartreuse de Champmol, 1686

A 9 h 30 apparaît notre guide, un puits de science qui nous conduit au puits de Moïse tout proche, l’un des deux grands ensembles conservés à la Chartreuse avec le portail de la chapelle qui contenait autrefois les tombeaux monumentaux des ducs Philippe le Hardi et Jean sans Peur.
Le puits de Moïse est le vestige d'un calvaire situé au milieu d'un puits autrefois au centre du grand cloître de la Chartreuse de Champmol.
Commandé par Philippe II de Bourgogne dit Le Hardi, il est l'œuvre du sculpteur hollandais Claus Sluter et de son neveu Claus de Werve, avec la participation du peintre Jean Malouel pour la polychromie. Il a été sculpté et peint entre 1396 et 1405. Les six prophètes Moïse, Isaïe, Daniel, Zacharie, Jérémie et David sont représentés sous des traits naturalistes, habillés de manière contemporaine, là encore on pourrait croire à de véritables portraits, accentués par des détails comme les lunettes (disparues) du prophète Jérémie. Détruit dans sa partie haute au cours du XVIIIe siècle, il n'en subsiste plus que la partie basse, constituée d'une pile hexagonale surmontée de six statues de prophètes de l'Ancien Testament. Seuls quelques fragments des statues situées autour de la croix sont actuellement conservés au musée archéologique de Dijon. Ce calvaire, qui montre le lien entre l'Ancien et le Nouveau Testament, est aussi une œuvre marquée par de nombreux symboles liés à l’ordre des Chartreux. Enfin, de nombreux indices font du monument une œuvre de propagande en faveur du duc de Bourgogne.
Le duc décédera en 1404, un an avant la fin de la réalisation du  puits de Moïse.
Il est considéré comme un chef-d'œuvre de la sculpture du gothique international et un précurseur de l'art de la Renaissance, un siècle avant la création du Moïse de Michel Ange.


Nous sommes captivés par cette profusion d’explications dont je ne relate qu’une infime partie. Vous trouverez sur internet  en tapant puits de Moïse et Chartreuse de Champmol une grande partie de ce que Frédéric, notre guide, nous a énoncé.

Les restes de la Chartreuse.



Nous traversons les jardins de l'hôpital plantés d'arbres vénérables et passons à proximité de l'ancienne tourelle de l'oratoire ducal.
Nous parvenons au porche d'une chapelle qui intègre les vestiges du portail. Ce porche couvert met totalement hors d'eau et hors d'air le portail et contribue à sa conservation.
Les historiens attribuent la conception du portail à l'architecte Drouet de Dammatrtin et au sculpteur Jean de Marville. L'attribution de la Vierge à l'enfant se fait tantôt à Jean de Marville , tantôt à Claude Sluter.Cependant le portail a été élargi par rapport au plan initial, peut-être lorsque Claus Sluter en a changé la conception afin d'ajouter les figures des ducs et des saints intercesseurs qui sont de sa main.
Les donateurs agenouillés sont présentés à la Vierge par un saint intercesseur, à gauche, le duc Philippe le Hardi agenouillé devant Saint Jean Baptiste, à droite la duchesse Marguerite, devant Sainte Catherine au centre la Vierge tenant l'enfant Jésus. La Vierge surtout retient l'attention par son mouvement et par les plis complexes du drapé de son vêtement. 


               Statue de Philippe le Hardi.         

Vous imaginez facilement que notre estomac commence à crier famine. D’ailleurs Roger, responsable des horaires nous demande de presser un peu le pas. Nous traversons les magnifiques jardins de l’Arquebuse sous une averse qui gâche notre plaisir. Après une petite marche apéritive, nous arrivons à midi et quart, comme prévu, à la porte de la brasserie des Loges au 8 de la place du Théâtre.
Le menu, jambon persillé, poulet sauce moutarde et tartelette au cassis est copieux et bien cuisiné. Il nous faut avaler rapidement le café car notre guide de l’après-midi prend le relais à 14 heures.
Nous allons arpenter les rues de la ville pour découvrir un autre aspect de son histoire, l’avènement aux 17èmes et 18èmes siècles de nombreux hôtels particuliers construits par une nouvelle noblesse de robe enrichie grâce à des fonctions très lucratives. Leurs noms à rallonge suffisent à nous renseigner sur leur fatuité de parvenus.   
Beaucoup sont assez délabrés et c’est dommage car ils ont une belle valeur architecturale. D’autres sont devenus propriété de la ville ou ont été aménagés en logements. Comme à chacune de nos expéditions, nous commençons à ressentir la fatigue et nous sommes moins attentifs. Cependant, nous avons un regain d’intérêt pour la visite du musée de la vie bourguignonne avec la reconstitution d’une rue avec ses anciens commerces. Nous retrouvons quelques souvenirs de notre enfance et  nous pouvons mesurer à quel point notre vie aura changé au cours d’à peine un siècle.
La journée s’achève, nous regagnons les voitures. Magasins et cafés ont beau nous tendre les bras. Peu se laisseront tenter, les activités de la journée ayant suffisamment usé nos énergies.   


Histoire de la Charteuse (source Wikipédia)

La construction de la chartreuse est décidée par Philippe le Hardi et le chantier inauguré au mois de septembre 1378. Philippe le Hardi acquiert un domaine au lieu-dit La Motte de Champmol. La première pierre de l'église est posée le 20 août 1383. Le duc souhaite créer une nécropole rivale de celle des Capétiens, à Saint-Denis . Le projet prévoit la construction d'une église et de bâtiments conventuels, un petit cloître, un grand cloître bordé de cellules spacieuses qui comportent un étage et un grenier et orné d'une fontaine centrale en forme de calvaire, la salle capitulaire et la sacristie., Les travaux ne commencent vraiment en fait qu'en 1383 et les moines s'installent dans le cloître en octobre de la même année. En 1399, les bâtiments du pressoir sont terminés et les moines commencent à exploiter leur vigne.

Un chantier prestigieux

Le chantier emploie plus de deux-cent cinquante ouvriers venus de divers horizons géographiques et de tous les corps de métier du bâtiment : imagiers (sculpteurs), peintres, tuiliers, verriers, menuisiers, fondeurs.
Le duc emploie des tailleurs de pierre d'origine hollandaise, dont Claus Sluter. Le portail est l'œuvre de Claus Sluter, promu maître de l'atelier en 1389, qui s'occupait de la décoration de la Chartreuse. C'est également lui qui réalise le puits de Moïse, calvaire doublé d'une fontaine, qui se trouvait dans le grand cloître.
Un projet politique
En fondant la chartreuse de Champmol, Philippe le Hardi manifeste une double volonté : celle de démontrer sa piété et celle de se poser en mécène. Enfin, en fondant la Chartreuse de Champmol, Philippe II indique que la capitale de ses États est Dijon, et non Lille. Par ailleurs, il rompt avec ses prédécesseurs puisque les ducs capétiens se faisaient inhumer à l'abbaye de Cîteaux, et affirme de fait la spécificité de la nouvelle dynastie bourguignonne.
Lorsque le duc Philippe meurt le 27 avril 1404, son tombeau n'est pas encore achevé. Les héritiers de Philippe le Hardi
Le nouveau duc, Jean sans peur, en confie l'achèvement à Claus Sluter puis à son neveu Claus de Werve. Tout au long du XVe siècle, les ducs de Bourgogne continuent à enrichir la chartreuse.
De la chute des États bourguignons à la révolution française
Du XVIe au XVIIIe siècle, elle demeure un monument très admiré, même si les travaux de modernisation au XVIIIe siècle la privent de certaines œuvres médiévales, jugées désuètes et remplacées par des objets contemporains.
La Révolution française et le XIXe siècle

Par le décret du 2 novembre 1789, l’Assemblée constituante décide que les biens ecclésiastiques sont mis à la disposition de la Nation ; par le décret du 13 février 1790, l’Assemblée supprime les ordres et congrégations régulières. La Chartreuse devient bien national et les Chartreux en sont chassés en avril 1791.
Elle est mise en vente et, en 1791, Emmanuel Crétet (futur ministre de l'intérieur de Napoléon Bonaparte) utilise sa fortune personnelle pour l'acquérir.
Sous le règne de Louis-Philippe, un hospice d'aliénés y est aménagé pour accueillir jusqu'à 250 malades. L'ouverture définitive eut lieu le 1er janvier 1843.
Aujourd'hui
Aujourd'hui, « la Chartreuse » désigne un centre hospitalier spécialisé en psychiatrie, addictologie et santé mentale, et l'expression « aller à la Chartreuse » signifie aujourd'hui à Dijon être hospitalisé en psychiatrie. Malgré ces vicissitudes, il demeure à la Chartreuse de fort intéressants morceaux de sculpture médiévale, témoignages majeurs de l'art burgondo-flamand.