Amur dans les vignes


Nous étions cinq, à la gare de Buxy en ce 27 janvier brumeux et crachoteux.
Etant donné la météo, la balade sera accomplie en cinq sec par cinq pas très secs.
Il manque le pilote

Buxy, son église, ses vieilles rues, sa tour rouge,

 mais aussi et surtout, sa cave coopérative.
Ah, la cave coopérative de Buxy! Qui parmi nous n'est pas allé quérir son cubi d'aligoté, puis l'a transporté comme le saint graal dans son sous-sol; a empli et bouché quelques bouteilles, en pestant contre ses p... de bouchons qui ne veulent pas s'enfoncer correctement, à cause de ce p... d'appareil qui dérape sur le goulot. Encore un truc chinois…

Mais à présent, l'orgueil de cette charmante localité, c'est le Montagny, divin breuvage issu du cépage chardonnay. Ce vin blanc donne «haleine fraîche et idées claires». Les moines de Cluny le préféraient, dit-on, à tout autre. Préférer le vin d'ici à l'au-delà, on ne saurait les en blâmer, fussent-ils hommes de Dieu.
La superficie plantée est de 310 hectares, la production de 16000 hectolitres soit 2 millions de bouteilles; le rendement moyen est de 50 à 64 hl/ha; un vrai fleuve, loin cependant d'atteindre le débit du Beaujolais avec ses 75 millions de bouteilles.
Quelques devises pour l'Amur, à réciter avec modération:
Aligoté à la mûre
Enchante les gens d’Amur
Chardonnay dans le gosier
Aide à suivre le sentier.

Le marcheur est réjoui
D'un cruchon de Montagny

Le randonneur, pour qu’il ne cale,
Doit arroser ses amygdales.
Notre circuit débute par la voie verte, qui étire son mince ruban d'asphalte sur l'ancienne ligne du chemin de fer.
Nous la quittons pour cheminer entre les vignes de Buxy et du village limitrophe de Bissey.
On peut voir au bord du chemin de drôles de brouettes faites de bidons éventrés en ferraille rouillée; les vignerons les baladent vers les tas de tailles qui seront entassées dans les petits véhicules et brûlées.


Le secret de fabrication de ces sympathiques engins est jalousement gardé; les Chinois ne sont pas encore parvenus à en dérober les plans. Le bouillant Arnaud peut dormir seul, mais tranquille, notre industrie de pointe n'a pas dit son dernier mot! Les rutilants tracteurs et autres enjambeurs indécents made-on-ne-sait-trop-où n' impressionnent pas notre vaillante petite brouette, fleuron de la technologie bourguignonne, fabriquée au canton, pas à Canton.
Germain et Germaine
Sur le coup des 16h, comme nous nous approchons du village, nous parvient le tintement des cloches.
L’église Saint-Germain de Buxy abrite la grosse Germaine. Une sacrée cloche, celle-là. Quand ses 1700 kg s’ébranlent, la belle (sans e pour nos amis d’Outre-Manche) sonne en ré, et ce depuis 1515, date de la bataille de….zut, ça ne me revient pas, et pourtant, j’y savais, M’sieur !
Le tympan de l'église Saint-Germain est orné d'une sculpture représentant l'âne du dit saint. Voici en quelques mots la légende qui s'attache à ce brave animal.

En 448, Germain, évêque d'Auxerre, entreprit un voyage à Ravenne, afin d'y rencontrer l'Impératrice Placidie, et plaider la cause des Armoricains en butte aux persécutions du méchant Aetius, général romain de son état, parti à la conquête d'irréductibles Gaulois. Or donc, le vaillant religieux arrive à Ravenne mais hélas, son compagnon à quatre pattes, fourbu après un si long trajet, s'effondre et meurt.
Placidie, bonne fille, offre un cheval à Germain. Celui-ci, jugeant la monture trop prestigieuse pour lui, humble serviteur de Dieu et des causes perdues, refuse ce cadeau impérial, se tourne vers la dépouille du baudet et lui dit: "Allez, viens, on rentre à la maison" (paroles dûment authentifiées car pieusement recueillies par plusieurs témoins dignes de foi). Sur ce, notre aliboron se lève et trottine auprès de son maître jusqu'à l’auberge où il ne restait qu'une chambre libre et une place de parc-ânes, à cause du flot de visiteurs attirés par la Mosaïc Week of Ravenne.
Huit jours (environ) plus tard, Germain passe de vie à trépas mais l'histoire ne dit pas si le fidèle bourricot l'a suivi dans l'au-delà.
Et pour finir un petit rébus pour les nuls:
    indice: nom d'une association dont le président est D...D...
Rendez-vous à Buxy pour la prochaine tempête de neige ou l’orage du siècle.

Autre vision de la balade du jour

 Buxy 2012, Buxy 2013 : bis repetita placent (pas vraiment)
Orchestre réduit, disons un quintette, pour jouer une mélodie en sol minable.
A la baguette ou plutôt au bâton, évidemment, le pilote du jour et son humour décapant.
Pour l’accompagner, un Attila botté, un président tout temps tout terrain, un couple dévoreur d’espaces venu du bassin minier.
Terrain fangeux, ciel bruineux, vent nul, visibilité à peine suffisante pour deviner les balisages.
Des flaques dans lesquelles nos chaussures font floc.


Vus, 3 parapluies et sous ces parapluies, des explorateurs… de la Voie Verte.
2 châteaux, 3 si l’on prend en compte la ruine qui, en son temps, protégeait la bourgade .
 

De belles toitures neuves, révélatrices du rang social des occupants.
Partout, des vignes provisoirement toutes nues, toutes recroquevillées, chrysalides des ceps de septembre aux couleurs chatoyantes et aux fruits gorgés de jus sucré.  
Un foudre non pas refuge d’un Diogène contemporain mais maison de poupée pour un Hans et une Gretel branchés jeux électroniques.

Une porte donnant sur rien, sculpture symbole de notre temps ?

Un dédale de petites rues révélant le passé d’un village aux mœurs surannées, des enfants inconnus et souriants ne nous ont-ils pas salués !
Rencontrés, 2 Anglais, pas étonnant par ce temps. Ils cherchaient à se restaurer. Aucun Mac-Do à Buxy ; à défaut, nous leur avons indiqué le meilleur restaurant, histoire de leur montrer ce qu’en France manger veut dire.
Pas de médailles à l’arrivée mais les chocolats de Dominique, récompense méritée, pas de champagne non plus mais du cidre, uniquement pour les bulles.
Comme toujours, les absents ont eu tort. Vous me direz « 2 heures trente de galère », mais si vous connaissiez la sublime jouissance que l’on éprouve à retrouver son intérieur douillet après cette épreuve, vous ne nous feriez plus jamais faux bond. 
2008, les rêves de Daniel

2009, les cauchemars de Daniel

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